Un corps pense selon plusieurs modes :
Un mode lent conscient, le seul véritablement reconnu dans notre culture qui a fait de «la pensée» l’apanage de l’homme et le fondement de toute connaissance.
Pourtant nous savons aujourd’hui que la pensée n’est pas déposée quelque part comme la marque distinctive de l’espèce humaine «puisqu’elle est le rapport adaptatif qui lie l’individu et l’espèce à son milieu» (A. Prochiantz). C’est pourquoi comme tous les vivants, qu’il s’agisse de bactéries, de plantes, d’invertébrés ou de vertébrés, un corps humain pense c'est-à-dire agit et réagit de manière extrêmement rapide pour sauvegarder à chaque instant sa vie dans un environnement sans cesse changeant. Cette intelligence remarquable conditionne sa manière unique de penser et par là même l’existence et le fonctionnement du mode conscient.
Cette intelligence de la vie semble elle-même changer de nature lorsqu’un individu fait l’expérience rare d’un troisième mode de penser «à vitesse absolue», celui des inventeurs, des créateurs. Un corps est alors dans une disposition particulière qui lui permet soudainement de voir (intuition), c'est-à-dire de com-prendre l’ordre admirable d’un ensemble de rapports (par ex en mathématiques, en art, cf Picasso : «Je ne cherche pas, je trouve» ou encore le troisième genre de connaissance chez Spinoza). Ch. 4 - Appendice II du livre