Physicien théoricien, philosophe et poète, fondateur du C I R E T (Centre International de recherches et d’études transdisciplinaires).
Au nombre des principes qui règlent la démarche et le travail de J.Bastien, il en est deux qui nous semblent au fondement de sa pratique :
Le premier exige d’opérer une révolution dans nos conceptions de la Mémoire .Le deuxième qui découle logiquement du premier impose une autre approche -transdisciplinaire- de la réalité. B.Nicolescu nous a éclairé et conforté dans cette nouvelle orientation qui se distingue fondamentalement de celle des méthodes classiques.
Ainsi, les sciences (exactes ou humaines) peuvent s’adapter à la complexité de leur objet d’étude en multipliant sur lui les points de vue, et tenter la coexistence de ces différentes approches. Cette puridisciplinarité se fonde toujours sur les manières de penser la réalité que sont les théories propres à chaque discipline.
On tentera d’élaborer par l’interdisciplinarité des stratégies de recherche qui s’interpénètrent et se corrigent mutuellement, de « définir le germe d’une nouvelle cohérence entre les sciences »en essayant d’articuler des champs épistémologiques à priori irréductibles.
L’hypothèse plus audacieuse de la transdisciplinarité ne se borne pas à un simple transfert d’un modèle d’une branche de la connaissance à l’autre, mais envisage l’étude des isomorphismes entre ces différents champs. Elle pourrait prendre en compte les conséquences d’un flux d’informations circulant entre eux. L’analyse de la nature et des caractéristiques de ce flux aboutirait à « l’élaboration d’un nouveau langage, d’une nouvelle logique, de nouveaux concepts entraînant un dialogue entre les chercheurs de diverses disciplines. »
En tant que membre du Ciret, pour le 20è anniversaire de cette fondation, nous avons rédigé un texte qui rappelle, en forme d’hommage, l’histoire de cette rencontre. (1)
"En 1977 j'avais résumé un premier travail de recherche en psycho-sociologie par la remarque d' E.Morin qui exprimait alors de manière pertinente dans son projet d'une "scienza nuova"ce que je ressentais après des années de travail sur le terrain :"Il s'agit bien plus que d'établir des relations diplomatiques et commerciales entre les disciplines où chacune se confirme dans sa souveraineté.Il s'agit de mettre en question le principe de disciplines qui découpent au hachoir l'objet complexe , lequel est constitué essentiellement par les interrelations , les interactions , les interférences , les complémentarités , les oppositions entre les éléments constitutifs dont chacun est prisonnier dans une discipline particulière".[ Le Paradigme perdu: la nature humaine:Seuil 1973].
Plus tard, en 1988 la lecture de l'ouvrage de B. Nicolescu :" Nous, la particule et le monde" décida de ma rencontre avec son auteur qui venait, l'année précédente, de créer le Ciret.Il accepta de participer au jury d'une thèse de psychologie sur le champ généalogique. A cette occasion il critiqua ma trop grande prudence qui s'exprimait dans un malentendu de taille : traduire par l'analogie ce qui en réalité dans ce champ d'expérience , en l'occurence celui des patients, apparaissait comme un isomorphisme où il constatait des résonances "incroyables" entre physique et psychologie.Je n'ai pas oublié cette leçon de méthode qui insistait aussi sur l'importance de l'expérimentation c'est-à-dire d'une pratique transdisciplinaire que j'ai essayé de mettre en oeuvre dans d'autres travaux.
Cette vision nouvelle de la recherche s'est en quelque sorte épanouie au cours des années dans le foisonnement de productions de ce véritable laboratoire de rencontres, d'échanges, de communications, de documentation qu'est devenu le Ciret. En hommage à celles et ceux qui ont favorisé cet épanouissement et en premier lieu à son fondateur physicien, philosophe et poète, je reprendrais ces mots de Niels Bohr qui ,selon Basarab, annoncaient "une nouvelle transdisciplinarité :"Toute expérience -qu'elle relève de la science, de la philosophie ou de l'art- susceptible d'être de quelque assistance au genre humain, doit pouvoir se communiquer par les moyens d'expression propres à l'homme, et c'est dans cette perspective que nous aborderons le problème de l'unité de la connaissance".Bien amicalement. André Matrat. Décembre 2007.
(1) Nous remercions B. Nicolescu de nous avoir autorisé à le mettre en ligne sur ce site.